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La finale du Concours de plaidoirie de l’université Paris 2 Panthéon-Assas s’est déroulée le jeudi 12 avril dans la salle des Conseils du centre Panthéon. Quatre candidats, Cassandre Claverie et Mathieu Cochet pour la demande, Agnès Lafont et Olivier Pedeboy pour la défense s’y sont affrontés sous l’œil bienveillant de M. Basile Ader, vice-bâtonnier, M. Guérin, ancien président de la chambre criminelle de la Cour de cassation et M. Paul-Louis Netter, vice-président du Tribunal de Commerce de Paris.
Cette finale conclut une série de plusieurs épreuves où les candidats avaient accès à toutes les sources de leur choix. Le cas d’étude était un cas imaginaire, comme toujours, mais en rapport avec l’actualité. Quelque cinquante candidats de niveau master 1 se sont d’abord prêtés à une épreuve sur table ; douze d’entre d’eux, répartis en six tandems, sont ensuite entrés en compétition à l’oral, en demi-finales, lors d’une plaidoirie de dix minutes. Durant la finale, la plaidoirie durait vingt minutes – auxquelles s'ajoutaient cinq minutes de droit de réponse.
En cause, M. Primus, élève-infirmier à l’Institut de formation en soins infirmiers de l’hôpital Saint-Louis de confession musulmane et stagiaire dans une maison de retraite médicalisée d’Argenteuil. Son directeur lui envoie un avertissement et le somme de tailler une barbe jugée « très imposante ». M. Primus s’y refuse. Il consulte un avocat pour contester la mesure devant le tribunal administratif de Paris.
La question en jeu, qui relève du droit administratif, touche à la grande question de la laïcité. Le cas proposé a été scruté sous tous les angles. Pour étayer leur argumentation sur des points de droit, les candidats se sont maintes fois référés à la constitution de 1946, à la Convention des droits de l’homme ou aux diverses jurisprudences. Cet appui théorique s’est vu compléter par un recours constant aux ressources de l’art oratoire : depuis l’Antiquité, il faut plaire, émouvoir autant qu’instruire. La posture, la voix, la diction, le sens de la formule participent de la force de la plaidoirie. L’avocat se doit d’affirmer sa propre autorité – sculpter, par les mots qu’il emploie, l’ethos cher aux Grecs.
Ainsi différentes figures de style ont émaillé les discours. On pourrait citer la classique captatio benevolentiae, au début de l’exorde du discours, qui accroche d’emblée l’auditoire – « laïcité : ce mot sent la poudre ! » lance Agnès Lafont – et les habiles péroraisons, par exemple celle d'Olivier Pedeboy : « Je vous demande, Messieurs les jurés, de vous faire les protecteurs de la laïcité » avant de citer Cyrano : « c’est un pic, c’est un roc, c’est un cap ; que dis-je, c’est un cap : c’est une péninsule ! ». On pourrait citer encore les apostrophes au jury, les comparaisons – Olivier Pedeboy a ainsi comparé le directeur de l’établissement à un « funambule qui aurait chu » – et autres arguments d’autorité, plusieurs candidats ayant rappelé que des présidents de la République, dont Émile Loubet ou Paul Doumer, portèrent la barbe en leur temps.
Si la demande a évoqué des principes juridiques, la défense s’est notamment appuyée sur le principe de précaution, invoquant les conséquences sanitaires dramatiques qu’un port de la barbe en milieu hospitalier pouvait causer. Et de citer les travaux de tel institut américain ou français, montrant les forts risques de « maladies nosocomiales » et présentant la barbe, selon l'expression employée par Cassandre Claverie, comme une « éponge bactérielle ». Agnès Lafont, dans son argumentation, a souligné, pour sa part, l’exigence de neutralité inhérente à l’exercice d’un métier dans le service public.
Au terme de cette finale, M. Netter a noté la difficulté à départager les candidats et souligné le « très grand plaisir » éprouvé à « admirer leur talent oratoire ». Il a précisé que la finale avait pleinement démontré la place de tous les lauréats au barreau et dans la magistrature. Le président Guillaume Leyte a remis les prix : médaille d’or pour Olivier Pedeboy pour la demande et Agnès Lafont pour la défense, médaille d’argent pour Cassandre Claverie pour la demande et Mathieu Cochet, pour la défense. Confrontation à la réalité pratique du métier, aide pour la sélection en master 2, échappée de l’univers universitaire, ce concours de plaidoirie, organisé depuis 2008, a récompensé les efforts d’étudiants désireux de goûter le plaisir du métier d’avocat … un peu en avance.