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Les Éditions Panthéon-Assas, reflet de la dynamique de la recherche pluridisciplinaire de l’Université Paris-Panthéon-Assas, mettent en lumière, depuis 1998, les travaux universitaires des professeurs à travers leurs ouvrages.
Les actes du colloque consacré aux vingt ans du Code général des collectivités territoriales, dirigés par Gilles J. GUGLIELMI, professeur à l’Université Paris-Panthéon-Assas, et Julien MARTIN, professeur à l’Université de Bordeaux, paraissent ce mois-ci. Cet ouvrage réunit les contributions d’une dizaine d’enseignants-chercheurs, tous spécialistes en droit public.
Pourriez-vous revenir sur la genèse du colloque que vous aviez organisé et dont l’ambition était d’effectuer un bilan du Code général des collectivités territoriales ?
Julien MARTIN – Quiconque enseigne le droit des collectivités territoriales ne peut qu’être frappé par ce double motif d’étonnement à la lecture du Code général des collectivités territoriales : les mêmes règles sont reproduites pour chaque catégorie de collectivités territoriales au sein de parties différentes qui leur sont dédiées, en même temps qu’il existe parfois des variations entre elles que l’on peine à expliquer. Ce constat va d’ailleurs bien au-delà du seul droit institutionnel, pour concerner également le droit financier, lui-même contenu, pour partie, dans le code. Bien évidemment, la codification à droit constant, opérée par la loi du 21 février 1996 et le décret du 7 avril 2000, explique largement ce phénomène. À l’issue d’un délai d’application de vingt ans, le temps était donc venu de poser la question de l’unification des règles applicables à toutes les catégories de collectivités territoriales.
Gilles J. GUGLIELMI – Un double anniversaire a alors fourni l’occasion de mettre en œuvre cette recherche. Initialement prévue en mars 2020, la manifestation aurait dû correspondre au vingtième anniversaire de l’achèvement de la codification générale du droit des collectivités territoriales. De plus, le colloque aurait également marqué le vingtième anniversaire du master Juriste Conseil des collectivités territoriales, né « diplôme d’études supérieures spécialisées en droit des collectivités territoriales ». Les deux évènements, à la mesure l’un de l’autre, seraient ainsi harmonieusement entrés en résonance. Bien évidemment, nul n’ignore que, quelques jours à peine avant le colloque, la France devait connaître son premier confinement, le retardant ainsi inexorablement…
Peut-on parler d’un tournant dans la culture juridique française concernant la codification du droit des collectivités territoriales ?
Gilles J. GUGLIELMI et Julien MARTIN – Le droit communal avait d’ores et déjà fait l’objet d’une codification, avec le Code de l’administration communale, entré en vigueur par un décret du 22 mai 1957, auquel devait succéder le Code des communes, dont la partie législative a été instituée par trois décrets du 27 janvier 1977, du 7 mars 1977 et du 28 mars 1977, et la partie réglementaire par trois autres décrets du même jour. Le Code général des collectivités territoriales s’insère, lui, dans le grand processus initié en 1989 sous le gouvernement de Michel Rocard. La codification en général, et celle du droit des collectivités territoriales en particulier, est donc un phénomène ancien, qui se poursuit d’ailleurs encore à l’heure actuelle (avec la récente adoption du Code général de la fonction publique).
Si la question consiste en revanche à se demander si le droit des collectivités territoriales est arrivé à un tournant, la réponse mérite d’être nuancée. Cet ouvrage est le résultat d’un travail de recherches collectif et d’inspiration purement universitaire. Il ne répond à aucune commande des pouvoirs publics, pas plus qu’il ne s’insère dans un quelconque mouvement de plus grande ampleur de réflexion sur la codification. Toutefois, l’heure est à la simplification des normes, tout particulièrement dans le droit des collectivités territoriales. La loi du 25 décembre 2007 avait créé une commission consultative d’évaluation des normes, au sein du comité des finances locales, devenu conseil national d’évaluation des normes avec la loi du 17 octobre 2013. Des États généraux de la simplification, ont, quant à eux, été organisés par la délégation aux collectivités territoriales du Sénat aboutissant à la signature d’une charte le 16 mars dernier. La question de la simplification par voie d’unification mérite donc d’être posée.
Quelles perspectives entrevoyez-vous désormais en droit des collectivités territoriales ?
Julien MARTIN – Tout exercice prédictif est délicat, et la difficulté se déploie bien au-delà du seul Code général des collectivités territoriales. La complexité pointée concerne en réalité l’ensemble des pans du droit s’appliquant à l’action publique : le droit de l’urbanisme, le droit de l’environnement, le droit de la commande publique, le droit de la fonction publique… L’heure est encore aux grandes codifications. Le Code de la commande publique est récemment entré en vigueur, le 1er avril 2019, au terme de l’adoption consécutive de l’ordonnance du 26 novembre 2018 portant partie législative du Code de la commande publique, et du décret du 3 décembre 2018. Le nouveau Code général de la fonction publique issu de l’ordonnance du 24 novembre 2021 vient, quant à lui, à peine d’entrer en vigueur le 1er mars 2022.
Gilles J. GUGLIELMI – L’évolution future du droit des collectivités territoriales est par ailleurs tributaire de rapports de force politiques se trouvant au cœur de la culture constitutionnelle et administrative qui marque l’identité de la France. Les réformes des vingt dernières années n’ont pas posé de lignes claires en définissant un échelon d’administration prioritaire différent à chaque réforme. Le plus simple serait certainement de modifier radicalement la logique de l’organisation territoriale de l’État en spécialisant les compétences, en sélectionnant seulement deux niveaux comme cadre de la démocratie représentative et en substituant une logique de coordination centralisée à celle de niveau pour les autres échelons rendus absolument nécessaires par des logiques géographiques ou fonctionnelles.
À quel public s’adresse L’Unité du droit des collectivités territoriales ?
Julien MARTIN – L’ouvrage est à destination de tous ceux que le droit des collectivités territoriales intéresse. Il y aurait toutefois une erreur à le croire réservé à un public académique, d’enseignants-chercheurs, voire d’étudiants. Sans être issue d’une demande des différents pouvoirs constitués, la réflexion qu’il contient est à la disposition de tous ceux qui veulent s’en saisir. Lorsque le temps de la discussion démocratique sur ces questions sera venu, les promoteurs d’une éventuelle réforme – Parlement, Gouvernement, ou membres des hauts conseils consultatifs chargés de préparer d’éventuels projets – pourront s’en saisir s’ils le souhaitent.
Retrouvez l'ouvrage en librairie dès à présent.