Dans cet entretien, le professeur révèle les principaux chantiers liés à la politique environnementale de l’université
Bertrand SEILLER, professeur de droit public, a été nommé chargé de mission Performance environnementale de l’Université Paris-Panthéon-Assas, auprès du vice-président en charge des affaires générales et institutionnelles.
Pouvez-vous vous présenter succinctement ?
Bertrand SEILLER – Je suis professeur de droit public au sein de cette université depuis 2001. J’y assure divers cours de droit et contentieux administratifs, domaines auxquels je consacre mes recherches depuis ma thèse soutenue en 1995 dans notre maison. Je dirige le master 2 de droit public approfondi depuis 2020. J’ai présidé le département de droit public et de science politique de 2016 jusqu’au printemps 2020 ; mes collègues ont souhaité que je reprenne cette fonction après l’élection de Stéphane BRACONNIER à la présidence de notre université. Enfin, je préside la Commission d’examen des vœux formulés sur Parcoursup par les lycéens désireux d’intégrer notre filière Droit.
Le président Stéphane BRACONNIER vous a nommé chargé de mission Performance environnementale au sein de l’université. L’environnement est un sujet devenu majeur dans notre société : pourquoi avez-vous accepté cette mission, et dans quelle mesure estimez-vous être particulièrement concerné par cette cause ?
Je suis très heureux que l’une des premières décisions de Stéphane BRACONNIER après son élection ait été de confier à un collègue la charge de proposer et de conduire la mise en œuvre de meilleures pratiques écologiques au sein de notre université. Naturellement, je suis très honoré qu’il m’ait confié cette responsabilité tout en étant pleinement conscient que c’est un défi assez considérable qui nous attend. S’il a pensé à moi, c’est probablement parce que nous nous connaissons depuis longtemps et qu’il sait ma très forte et ancienne sensibilité aux questions écologiques. Nous en avons souvent parlé et partageons la même conviction que des progrès peuvent et doivent être faits dans notre fonctionnement quotidien.
Le président BRACONNIER sait que, comme bien d’autres aujourd’hui, je m’efforce d’adopter des comportements écologiquement vertueux dans ma vie personnelle. Avec mon épouse, nous sommes membres actifs d’une AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) depuis plusieurs années et consommons quasi exclusivement des produits bio et locaux. Nous sommes engagés depuis longtemps dans une démarche « Zéro déchet » et avons constitué un groupe de « marche propre » dans les rues de notre quartier. Nous nous déplaçons le plus souvent possible à pied, à vélo ou en train. Sans doute, le président BRACONNIER pense-t-il que l’expérience concrète acquise sur ces diverses questions, manifestation de convictions avérées, peut être utile pour notre université.
Quelles seront les premières actions que vous allez mener dans le cadre de la mise en place de cette politique environnementale ?
J’ai d’ores et déjà transmis au président une liste de propositions nombreuses et très diverses.
Beaucoup se rapportent à des pratiques en apparence fort modestes et dont l’incidence environnementale peut être considérée comme faible à l’échelle de l’université et a fortiori comme nulle à celle de la planète ou du pays. Telle est l’appréciation que l’on peut porter, par exemple, sur la proposition que les distributeurs de boissons chaudes de nos différents centres disposent d’une fonction « j’ai mon gobelet » ou que les imprimantes des services administratifs soient paramétrées pour imprimer par défaut en mode brouillon. Ce sont des petits gestes mais dont il faut comprendre qu’ils s’ajoutent à d’autres et qu’ils finissent par avoir un effet utile. Ainsi, une imprimante bien paramétrée peut consommer jusqu’à 50 % d’encre en moins. Qui plus est, n’est-ce pas précisément parce que ce sont des petits gestes qu’il est facile de les adopter et qu’il faut commencer par eux ?
D’autres propositions que je formule nécessitent probablement un peu plus d’engagement, comme la réduction de la consommation de papier, notamment dans le cadre de la diffusion des fiches de travaux dirigés. C’est un problème sur lequel la prise de conscience est ancienne et qui a déjà permis de substantielles économies de papier pour notre université. Il est vrai que le basculement des fiches de travaux dirigés en version numérique n’est pas nécessairement meilleur pour l’environnement et qu’il peut être par ailleurs la source d’inégalités entre les étudiants selon leur équipement informatique et leur capacité, technique ou financière, à imprimer leurs fiches s’ils le souhaitent. Il convient d’évaluer les différentes possibilités, de ne pas se montrer dogmatique et d’ouvrir des choix. Il en restera toujours quelque chose de positif d’un point de vue environnemental.
Certaines propositions exigent de surmonter quelques contraintes juridiques, comme la modification des cahiers des charges afférents à nos marchés de fournitures de bureau de manière à favoriser l’achat de produits rechargeables, recyclables, faits en France ou en Europe, etc. Cela prendra évidemment plus de temps mais, avec le soutien du président et l’implication des services compétents, nous pourrons avoir des achats plus « éco-responsables ».
D’autres, enfin, supposent des moyens financiers, car elles ont un coût, comme la rénovation énergétique de nos bâtiments ou, projet qui me tient à cœur, l’installation de panneaux photovoltaïques sur les toits de ceux qui s’y prêtent. Sur tous ces points, il faut bien comprendre qu’outre leur impact environnemental positif, ces dépenses sont des investissements qui produiront des économies ou que certaines dépenses accrues sur certains postes seront compensées par les économies réalisées sur d’autres.
Car l’écologie ce n’est rien d’autre que l’adoption de pratiques économes. Il s’agit tout simplement d’éviter le gaspillage des matières premières et de l’énergie. De surcroît, en évitant d’acheter des produits fabriqués à l’autre bout de la planète, on favorise l’emploi local ou à tout le moins national ou européen.
Plus globalement, le président BRACONNIER souhaite que les efforts réalisés pour améliorer l’impact environnemental de notre université soient récompensés par la certification de celle-ci. Il est en effet possible d’envisager une certification ISO 14001 qui distingue un système efficace de management environnemental. Nous allons étudier les moyens d’atteindre cet objectif ambitieux.
De quelle manière pensez-vous fédérer l’ensemble des acteurs de l’université autour de la problématique environnementale ?
Dans la mesure où je suis convaincu de ce que l’écologie est fondamentalement une affaire de comportements individuels plutôt que de politiques publiques plus ou moins imposées et surtout, le plus souvent, mal expliquées, je souhaite précisément associer le plus grand nombre à l’évolution engagée au sein de notre communauté universitaire. Certaines composantes - à commencer par le département de gestion, déjà mobilisé sur cette question -, certains services - comme celui des marchés publics -, et probablement, à titre individuel, bien des personnels administratifs, des enseignants-chercheurs et évidemment des étudiants, partagent les préoccupations et les convictions que je viens d’exprimer. Le concours de toutes les bonnes volontés sera la meilleure garantie de la réussite. Il sera précieux de s’appuyer sur des relais dans chaque département, dans chaque service et dans chaque filière. Outre le fait que ces volontaires apporteront également des idées et des bonnes pratiques, leur rôle sera d’expliquer, d’inciter et surtout de montrer, par leur propre exemple, qu’il n’est guère compliqué d’améliorer l’impact environnemental de notre université. L’écologie nous concerne tous et chacun peut y contribuer à son niveau. J’invite en conséquence tous ceux qui le souhaitent à me contacter.